C’est dans l’air velouté de Prato que renaît la laine oubliée. Chez Comistra, chaque fil entame une seconde vie, comme un murmure venu d’un autre vêtement, d’un autre temps. Depuis plus d’un siècle, cette maison toscane orchestre une alchimie rare : transformer les vestiges textiles en étoffes nobles, à la main dense et à l’élégance brute. Dans cet atelier circulaire, la beauté se cultive à même la matière recyclée.

Fondée en 1920, Comistra est restée fidèle à sa vocation initiale : redonner souffle et noblesse à ce que d’autres considèrent comme des rebuts. De père en fils, la famille a conservé ce lien profond avec la terre de Prato, son histoire textile, son énergie industrielle. Ici, la laine usagée, triée avec une minutie quasi-méditative, est effilochée, puis réassemblée selon un processus mécanique transmis depuis des générations. Sans chimie, sans teinture. La couleur vient des vêtements eux-mêmes, de leur passé, de leurs voyages.
Les tissus qui sortent des ateliers Comistra ont la gravité des matières profondes. Draps cardés, flanelles souples, chevrons feutrés, mélanges laine/polyester régénéré : chaque étoffe parle d’un engagement sincère, d’un amour de la fibre, d’une esthétique du réel. Leur texture légèrement irrégulière, leur chaleur silencieuse, leur tombé sûr séduisent autant les maisons de luxe que les jeunes créateurs en quête de récits tangibles.
La production, intégralement concentrée dans un rayon de 10 km autour de l’usine, obéit à une logique de circuit court rigoureuse. Les cycles d’eau sont fermés, les énergies majoritairement renouvelables. C’est une forme de luxe lent, sans éclats tapageurs, qui trouve dans la laine régénérée son manifeste.
Comistra participe aux grands salons du textile – Milano Unica, Première Vision Paris, Paris Fabric Show et PRECO – mais c’est dans le silence de ses rouleaux, dans la sagesse de ses gestes, qu’elle révèle toute sa singularité. Une maison comme on n’en fait plus, où chaque mètre tissé est une preuve de fidélité à la terre, au fil, et au futur.






Michael Timsit